Une contribution de Jacques Giber
Ces choses sont-elles frivoles ? L'Art héraldique
Ayant acquis avec Manon Lescaut mon premier livre en provenance du XVIIIème siècle (voir mon article de décembre 2018), j'ai naturellement cherché ensuite un livre provenant du XVIIème siècle. C'est en furetant chez un libraire de Versailles que parmi les encombrants in-folio de l'époque, j'ai découvert ce livre qui présente trois avantages pour moi: il est tout petit, il est en bon état intérieur, il traite, avec des planches illustrées, d'un sujet qui m'intéresse depuis longtemps (Voir Note de l'Auteur n°1): l'héraldique.
Je le décris ainsi :
L'Art héraldique ou la manière d'apprendre facilement le blason. 1672, sans nom d'auteur. 'Chez Charles Osmont, au cinquième Pillier [sic] de la grand' Salle du Palais, à l’Écu de France'. 'Avec Privilège du Roy'. In-12 (150x90x18mm). Reliure d'époque plein cuir havane, dos à 5 nerfs avec motifs floraux dorés aux entre-nerfs. Filet doré sur les coupes. Frontispice gravé, titre, 3 pp: 'Table des chapitres et articles contenus dans ce livre', 2 pp: 'Extrait du Privilège du Roy', puis 154 pp numérotées réparties en 4 chapitres et 24 articles, dont 'Table des principaux termes du Blason en François-Latin' et 'Table des noms des Familles, dont les Armes sont gravées & blasonnées dans ce livre' en fin. Errata. En outre 29 planches hors texte en noir et blanc, portant le numéro de la page en regard, vignettes, lettrines et culs-de-lampe. Ex-libris manuscrit « G. Latoison-Duval 1888 ». Frottements d'usage sur le cuir, titre doré passé mais lisible, coiffe de tête arrachée sans perte de la tranchefile, réparation des charnières en tête, petite étiquette en pied, coins frottés, pas de rousseurs, mouillures ou trous de vers. Très bon état compte-tenu de l'époque.
Il s'agit donc d'un manuel d'héraldique petit format, tenant dans la poche et apparemment très complet. J'ai très vite découvert que cette édition de 1672 était la première d'une suite de nouvelles éditions revues et augmentées. Cet ouvrage devait être demandé et son auteur assez passionné pour le compléter. Nous trouvons donc sur le marché (les sites de vente en ligne) des éditions notamment datées de:
1680,
1681,
1682, 'dernière édition par M Baron, Avocat en Parlement, plus ample de plus d'un tiers que les précédentes'
1693, 'par M Baron, Escuyer, nouvelle édition revue et augmentée par M Playne, A.E.P.'
1695
1717, 'nouvelle édition, révisée, corrigée et augmentée par A. Playne, A.E.P.'
Il y en a peut-être eu d'autres...
Nous apprenons au passage que l'auteur de ce manuel, resté anonyme dans la première édition, est Monsieur Baron, prénommé Jules ou Julius, qui était avocat au [ou 'en', selon l'expression de l'époque] Parlement de Paris, en abrégé A.E.P. Nous ne savons rien d'autre sur Jules Baron. Était-il décédé en 1693 lorsque son collègue Ambroise Playne prit sa suite, pour proposer de nouvelles éditions augmentées de son ouvrage ? Optons pour une continuité amicale. D'Ambroise Playne, nous savons qu'il avait aussi publié en 1686, chez Jacob Grou, à l'enseigne de l'Ange, rue de la Huchette à Paris, un long poème en latin à la gloire de Louis XIV : Ludovici Magni Francorum Imperatoris Semper Augusti Victoriae Gestorumque Series.
En revanche, nous ne trouvons pas trace de cette suite d'ouvrages dans le monumental Traité d'héraldique de Michel Pastoureau (Voir Note de l'Auteur n°2), qui cite parmi d'autres son principal concurrent de l'époque, Le véritable art du blason de Claude- François Ménestrier (Voir Note de l'Auteur n°3), qui connut 16 rééditions revues et augmentées entre 1659 et 1705. Michel Pastoureau juge sévèrement l'engouement pour l'art héraldique à cette époque et toutes ces publications :
«Bien que différents dans leur forme et dans leur objet, tous ces manuels et traités de blasons du XVIème, XVIIème et XVIIIème siècle ont en commun certaines caractéristiques. La principale réside dans leur aspect extrêmement théorique et normatif: tous décrivent des principes qui relèvent plus de la construction intellectuelle que de l'observation des faits; tous énoncent une foule de règles minutieuses et rigoureuses qui dans les usages ne sont guère respectées; tous, enfin, enseignent plusieurs centaines de termes, dont 80% sont d'un emploi rarissime et donc d'aucune utilité pour leurs lecteurs. Et pourtant, malgré cette absence de liens avec la réalité des mœurs héraldiques, tous ces ouvrages, sans exception, furent des succès de librairie. Au point qu'il est permis de se demander si cette littérature qui se voulait didactique ne fut pas, avant tout et malgré elle, une littérature d'évasion. Ce que confirmerait son manque d'impact sur l'évolution réelle des armoiries entre le milieu du XVIème siècle et la fin de l'Ancien Régime. [...] Parallèlement à cette héraldique didactique se développe une héraldique érudite, cultivée non plus par des techniciens du blason, mais par des savants et des chercheurs qui, les premiers, voient dans l'étude et le recensement des armoiries anciennes une utile science auxiliaire de l'histoire et de l'archéologie.»
Ainsi prévenu, mais finalement preneur du qualificatif de ''littérature d'évasion'' (ou ''héraldique d'évasion'', comme peut-être ''bibliophilie d'évasion'' ?), je continue de m’intéresser aux travaux de Jules Baron et Ambroise Playne, d'autant plus que je découvre aussi que certains exemplaires des livres de Playne sont coloriés, en particulier dans l'édition de 1717, la dernière de la suite. Et je me procure donc un bon exemplaire de celle-ci, pour pouvoir la comparer à celle de 1672, la première édition de Baron, et à celle de 1682, la dernière édition de Baron, qui se trouve être aussi disponible en ligne (Voir Note de l'Auteur n°4). Cet exemplaire de 1717 est ainsi décrit par la librairie Art-Gil de Rodez : L'Art héraldique ou la manière d'apprendre facilement le blason. A Paris, Chez Charles Osmont, 1717. In-12 relié demi-chagrin vert, dos à nerfs, titre doré et fleurons dorés, date en queue. Tranches rouges. Reliure postérieure XIXè. Frontispice en couleur, titre, 6 feuillets non chiffrés, 291 pages, 17 pages (table et approbations), 1 feuillet blanc. Bien complet des 35 planches de blasons et couronnes entièrement colorées à la main. Les pages 103 à 106 se détachent légèrement. Bords de page effrangés de 103 à 109 et sans gravité. Nouvelle édition, revue corrigée et augmentée (Cette nouvelle édition est l’œuvre de A. Playne, mais l'édition originale est due à Jules Baron)
Le point de départ de ce traité didactique, qui ira en se compliquant et se raffinant presque à l'infini, c'est, après les formes des écus, l'exposé, à l'article III du chapitre I illustré planche 2, des couleurs utilisées, nommées en langage héraldique Émaux, à savoir :
- 2 Métaux: Or (jaune) et Argent (blanc),
- 5 Couleurs: Azur, Gueules (rouge), Sable (noir), Sinople (vert), et le rare Pourpre,
- 2 Fourrures: Hermine et Vair (avec leurs dérivés)
et leur représentation par hachures et pointillés, indispensable pour comprendre les gravures en noir et les blasons sculptés sur les façades des demeures et châteaux. La version colorée est plus parlante immédiatement.
Impossible de savoir qui a appliqué les couleurs, sur combien de livres et à quelle époque: dès 1717, avant ou après brochage, ou bien très postérieurement, sur le livre relié ?
Dans toutes les éditions, la première planche seule est signée, discrètement en bas à droite, d'un 'Lulié.Fe' en cursive pour 'Lulié Fecit', réalisé par Lulié (Voir Note de l'Auteur n°5).
Toutes les éditions aussi ont conservé le même curieux frontispice. Est-ce pour le signer allusivement que Lulié, s'il en est le graveur, a redoublé le 'l' de 'facilement', écrit correctement à la page de titre suivante ?
Un personnage belliqueux au regard néanmoins pensif, casqué et empanaché, en armure, mais jambes nues dans de courtes bottes, brandit un cimeterre; débouchant d'une galerie voûtée, il piétine littéralement six moins grands personnages demi-nus, hommes et femmes, se tordant tout effrayés sur le sol. Si le bouclier du premier, orné des armes de France 'd'azur à trois fleurs-de-lys d'or, 2 & 1' désigne évidemment le Roi de France ou la France, les écus des personnages au sol portent aussi des armes, moins faciles à déchiffrer et attribuer. On y reconnaît (en anticipant un peu sur les enseignements de l'ouvrage) un écu 'de sable tranché d'argent', un autre 'd'or au lion de gueules', un troisième 'coupé d'or au lion issant de gueules et fascé-ondé d'azur et d'argent' et on y distingue aussi une tête d'aigle et d'autres lions, d'azur, de sable ou d'or. Ont-ils été choisis au hasard, ou bien sont-ils représentatifs de personnes ou d'entités politico-géographiques vaincues par le Roi ? A l'époque de la première édition, le seul conflit terminé était la Guerre de Dévolution, conclue par le traité d'Aix-la-Chapelle de 1668, essentiellement au détriment de la Flandre espagnole, tandis que débutait la Guerre de Hollande (1672-1678). D'autre part, être trop explicite pouvait être imprudent.
Remarquons seulement que le troisième blason précité ressemble à celui de la Zélande, province pluri- insulaire du sud des Pays-Bas, aux bouches de l'Escaut, dont le lion de gueules est de plus 'couronné de même' chez Joubert, mais seulement 'armé [griffes] et lampassé [langue] d'azur' ailleurs; de fait le lion, avec diverses variantes, est dominant dans les armoiries des villes et provinces flamandes concernées par les guerres de Dévolution et de Hollande.
Le premier blason, 'de sable tranché d'argent' – mais pour quelle raison alors le montrer ? - est celui de la famille Capponi6 cité page 24 (éd. 1672) et dans la planche 3. Les véritables intentions de l'illustrateur nous échapperont peut-être toujours.
Après énonciation des règles précises et contraignantes et de la terminologie détaillée des pièces, partitions et meubles, avec force exemples, le traité didactique se transforme en respectueuse énumération (ou obséquieuse invocation ?) des hauts personnages, d'abord les ecclésiastiques bien sûr, puis les politiques du Royaume, jusqu'aux Officiers de la Maison du Roy: Grand Maître, Grand Pannetier, Grand Chambellan, Grand Escuyer, Grand Veneur, Maréchal de France, Grand Maître de l'Artillerie, Grand Amiral, Général des Galères, Chancelier, etc. avec la litanie de leurs seigneuries et charges. Ces armes réelles nous ramènent à l'héraldique d'évasion (avant d'en venir à l'héraldique imaginaire, évasion 'au carré'), porteuse d'une sorte de poésie, dans une langue désuète, normalisée et monotone (Voir Note de l'Auteur n°7), cependant évocatrice, on y entend presque le héraut, les fanfares et les tambours, par exemple :
« M. LOUYS de LORRAINE Comte d'Armagnac, de Charny & de Brionne, Vicomte de Marlan, Neubland, Couliège, Binand, Grand Senechal de Bourgogne, Gouverneur d'Anjou, Ville & Château d'Angers & du Pont de Cé, Pair & Grand Escuyer de France ; parti de trois et coupé d'un, qui font six [sic] quartiers: au 1. burelé d'argent & de gueules, qui est de Hongrie; au 2. semé de France, au lambel de gueules, qui est de Naples-Sicile; au 3. d'argent à la croix potencée d'or, & cantonnée de quatre croisettes de mesme, qui est de Jérusalem; au 4. d'or à quatre pals de gueules, qui est d'Arragon; au 5. semé de France à la bordure de gueules qui est d'Anjou; au 6. d'azur au lion contourné d'or couronné, armé et lampassé de gueules, qui est de Gueldres; au 7. d'or au lion de sable couronné, armé et lampassé de gueules qui est de Iuliers; au 8. & dernier d'azur semé de billettes [erratum p154: lisez croisettes!] au pied fiché d'or, & deux bars adossez de mesme, qui est de Bar. Et sur le tout d'or à la bande de gueules chargée de trois alérions d'argent, qui est de Lorraine; le grand écu brisé d'un lambel à trois pendans de gueules, & d'une bordure de mesme chargée de huit besants d'or. » Appelé Monsieur le Grand, au surplus, en ornements sous la couronne de duc et pair (et non de comte), pour marque de sa charge, « le Grand Écuyer porte deux épées en fourreau avec leur ceintures [sic] & semées de France placées aux côtés de l’Écu.»
Il y en a des pages et des pages, et graveur puis coloriste éventuellement ont eu bien de la peine pour l'illustration! Notons plusieurs variations, corrections, mises à jour, d'une édition à l'autre. Ainsi, parmi d'autres :
En 1682, le nouveau paragraphe sur Louis de Lorraine précise qu'il est « Gouverneur pour sa Majesté du Païs d'Anjou...», que l'écu « est parti de trois et coupé d'un, qui font huit quartiers composant quatre Royaumes et quatre Duchez » et corrige les armes de Bar sans signaler, comme le fait le paragraphe très allongé de 1717, que son fils Henry « reçut en survivance la charge de Grand Ecuyer, en prêta serment le 25 février 1677».
En 1672, l'écu du Chancelier est laissé en blanc, car après la mort de Séguier, la chancellerie fut vacante de 1672 à 1674, Louis XIV tenant lui-même les sceaux de février à avril 1672. En 1682, les armes de Michel le Tellier (le père de Louvois) sont apparues, 'd'azur à trois lézards d'argent posez en pal, au chef cousu de gueules aux trois étoiles d'or', avec la mention suivante dans le descriptif page 138: « Il a succédé à cette Charge après la mort de M. d'Aligre [Étienne, son cousin germain, nommé en janvier 1674] en Octobre 1677». En 1717, Daniel François Voisin, Seigneur de Noraye tient la charge; le texte signale qu'il « prêta serment le 2 juillet 1714 ». Ses armes 'd'azur à trois étoiles d'or, à un croissant montant d'argent, mis en cœur, ou en abîme' sont accompagnées à profusion d'ornements abondamment décrits: colliers, timbre, lambrequins, mortier, cimier à figure de Reine tenant un sceptre et les sceaux, masses de vermeil en sautoir, manteau d'écarlate doublé d'hermine !
Après ces quelques exemples, abordons maintenant la comparaison des trois éditions, de 1672, 1682 et 1717. Elle portera sur les dimensions, le papier, la pagination, la table des matière, la quantité d'informations et les planches. Exercice minutieux d'attention, de manipulation soigneuse et de lecture fragmentaire des livres...
La présentation synoptique oblige hélas à recourir maintenant à de petits caractères pour être complet !
Nous pouvons nous interroger sur les aspects pratiques de fabrication de ces planches avec leur cadre, uniforme au cours du temps, de 127x75 mm et leur réemploi d'une édition à l'autre en introduisant les modifications énumérées. Sur certaines planches, comme Q02 (voir ci-dessus page 3), un seul écu sur quinze a été substitué; il a donc fallu effacer l'ancien du support de gravure (cuivre ?) et graver le nouvel écu; il a fallu aussi effacer l'ancienne pagination et graver la nouvelle, tout cela à l'intérieur d'un support comportant plusieurs planches imprimées ensemble avant séparation par coupe.
Pour les planches nouvelles, Q30 (R35), Q31(R36), R10, R11, R16, leur facture paraît différente, plus fruste; dans R10 et R11 les écus sont plus petits et plus nombreux.
Pour les planches en dédoublement R03, R04, R27, R28, il y a reprise partielle des anciennes planches et complément dans le même style très simple avec des écus déjà petits dans P03.
Les couronnes de R27 et R28 paraissent un peu moins fines que celles de Q23.
Ces nouveautés sont certainement d'une autre main, anonyme, que celle de Lulié.
Nous pouvons aussi nous interroger sur la raison pour laquelle trop souvent, en 1682 et 1717, la planche paginée 'page N' ne se trouve pas en regard de la page N, mais de la page N+1, plus rarement N-1; il aurait suffi d'insérer la planche par son autre grand côté pour retrouver la situation très satisfaisante de 1762. De même pour les positions erratiques de la pagination des planches, en haut à gauche ou à droite, dans ou hors du cadre. Il semble que graveur et éditeur se soient ensuite moins appliqués qu'en 1672. Ou bien s'agit-il pour partie des relieurs du XIX ème siècle, qui n'auraient pas établi leurs exemplaires avec la même logique rigoureuse que pour celui de 1672 relié d'époque.
Venons-en d'ailleurs à l'éditeur, uniformément Charles Osmont, de 1672 à 1717, bénéficiant du Privilège du Roy. Ce nom désigne plusieurs éditeurs successifs, car, nous apprend la base de données de la BNF (Voir Note de l'Auteur n°8), il a existé une véritable dynastie d'Osmont, qualifiés d'imprimeurs-libraires, prénommés Charles de père en fils !
Charles I Osmont. Baptisé à Rouen le 26 juillet 1634. Fils du libraire rouennais Charles Osmont (160.?-1666?) et recu maitre à Rouen le 30 juin 1656. Recu apprenti du libraire parisien Antoine de Sommaville à Paris en janvier 1663 ; son brevet d'apprentissage est cassé par arret du Conseil du 10 novembre 1663, "comme étant marié" et venu de province où il aurait déjà appris le métier et travaillé comme compagnon. Semble avoir pu malgré tout achever son apprentissage chez Jacques Cottin (février 1668). En novembre 1671, il achete la charge de "libraire suivant la cour" mais cette vente est cassée par arret du Conseil du 27 juin 1672, sur intervention de la communauté des libraires et imprimeurs de Paris. Semble avoir pourtant continué à exercer, avant d'etre officiellement recu libraire le 18 septembre 1686, en qualité de gendre du libraire-relieur parisien Jacques Compaing. Encore en activité en 1689. Sa veuve, Louise Compaing, est attestée en 1690 Charles II Osmont. Fils et successeur du libraire parisien Charles I Osmont. Recu maitre le 17 aout 1688. Dit âgé de 33 ans lors de l'enquete de novembre-décembre 1701. Sépulture le 22 sept. 1729 à Paris. Travaille en association avec sa mere, veuve de Charles I Osmont, de 1699 à 1702 Charles III Osmont. Imprimeur-libraire; imprimeur de monseigneur l'éveque de Troyes; imprimeur de l'Académie royale de chirurgie (1743-1746). Fils ainé du libraire parisien Charles II Osmont. Recu libraire le 30 avril 1715, dit alors âgé de moins de 20 ans ; recu imprimeur le 4 avril 1722. En juin 1748, se démet de son imprimerie en faveur de son gendre Francois Delaguette apres s'etre démis en septembre 1747 de sa place d'imprimeur. Doit cesser peu apres d'exercer la librairie à la suite d'une convention passée avec ses créanciers (15 juin 1748). D'apres l'"Historique des libraires..." de l'inspecteur Joseph d'Hémery, il aurait "fait banqueroute" en 1748. Il est pourtant encore en activité en 1757. Décédé à Champigny-sur-Marne le 1er novembre 1763.
Ainsi Charles I a pu éditer Baron de 1672 à 1682, malgré sa situation précaire au début, et Charles II a pu éditer Playne jusqu'en 1717. Charles I avait installé son échoppe près du cinquième pilier de la Grande Salle du Palais ou du côté de la Cour des Aides, au Palais de la Cité, au dessus de l'actuelle Salle des Gens d'Armes semi-souterraine. L'immense Grande Salle Haute du XIVème siècle (64m x 27,5m), détruite par le feu en 1618, avec sa double voûte carénée en bois sur piliers centraux, la grande table de marbre noir et les 42 statues polychromes des rois, fut reconstruite en 1622; incendiée sous la Commune, elle deviendra la solennelle Salle des Pas Perdus du Palais de Justice. Au XVIIème siècle, c'était l'un des centres de la vie parisienne, bazar mêlant chalands et légistes. Corneille y situa sa comédie La Galerie du Palais ou l'Amie Rivale (1637). A défaut d'être propice à l'exercice d'une bibliophilie paisible et érudite, c'était bien le lieu pour acheter un manuel d'héraldique pour peut-être reconnaître - ou s'approcher d'une part de leur prestige ? - les plus importants participants à ce tourbillon. Robida nous en parle ainsi (Voir Note de l'Auteur n°9) :
« Revenons aux échoppes et commerces du Palais. A l'intérieur comme à l'extérieur, comme dans les cours, les boutiques se pressaient dans la grande salle, tout le long des galeries, utilisant tous les coins, tous les passages, même les plus étroits. Le livre de Georges Corrozet, le premier historiographe parisien: La fleur des Antiquitez, Singularitez et Excellences de la plusque noble et triomphante ville et cité de Paris, se vendait « au premier pillier en la grant salle du Palais » chez Denis Janot, en 1532, de qui plus tard Corrozet, devenu le gendre, reprit la 'boutique'. Les boutiques étaient surtout serrées dans la galerie Marchande ou des Merciers, centre du Palais bruyant et affairé, où elles formaient deux rangées entre lesquelles la circulation devenait difficile. Le Paris élégant flânait aux étalages où chaque boutiquier appelait le chaland et s'efforçait d'attirer leur attention en vantant ses marchandises. Les jolies mercières du Palais ont aux XVIIème et XVIIIème siècle une réputation de coquetterie bien méritée, car pour faire connaître les modes nouvelles, elles se parent de superbes dentelles, des grands collets montés ou rabattus, des grandes manchettes des élégantes et ''galantisent'' sur les coiffures. Il en était encore de même avant la Révolution [jusqu'à ce que le Paris élégant élise pour un demi-siècle le Palais-Royal des Orléans et ses galeries et colonnades nouvelles ...]; Mercier, qui a vu la fin du Palais d'autrefois, appuie sur le contraste des robes noires des légistes voisinant avec les coquetteries et les futilités des boutiques de la galerie ... »
Pour le plaisir, suivons-y encore Cyrano de Bergerac, évoqué par Paul Féval fils et Lassez dans l'une des suites, s'ouvrant en 1641, du roman de Dumas et Maquet Les Trois Mousquetaires, 7 ans avant Vingt ans après (Voir Note de l'Auteur n°10) :
« La galerie du Palais était, à cette époque, la providence des galants. On y trouvait de tout, et spécialement un assortiment complet de ces riens dont leur inutilité absolue fait tout le prix. Dans des échoppes, adossées aux piliers sacro-saints de ce temple de la Justice, des marchands débitaient, pêle-mêle et côte à côte avec le livre du jour ou l’arme à la mode, les mille frivolités et fanfreluches qui furent de tout temps le triomphe de l’ingéniosité de Paris. En d’autres circonstances, Cyrano eût passé avec le plus parfait mépris au long de ces étalages de futilités, bonnes tout au plus pour ces freluquets vêtus à l’espagnole, et enrubannés ridiculement jusqu’à la moustache, qu’on voyait promener dans la galerie leurs mines pâmées de petits-maîtres, ou pour les belles du jour qui minaudaient, en grand décolleté, le visage abrité sous les barbes de dentelle du masque italien, lorgnées au passage par les galants et répondant à leurs avances par des clins d’œil d’une langueur assassine. À l’ordinaire, le bretteur n’eût eu d’yeux que pour les belles gardes d’épée finement ciselées, ou pour les lames souples artistement damasquinées, triomphe de l’art florentin ou tolédan. Ou bien encore il se fût attardé à feuilleter les pages encore humides de la presse, de quelques poèmes nouveaux. Mais Cyrano était amoureux, et cela suffisait
à lui faire une âme toute neuve.»
d'Artagnan contre Cyrano, T2, Le martyre de la reine (1925)
La boutique rue Saint-Jacques était certainement plus tranquille ! Les Osmont y ont gardé l'Ecu de France comme enseigne, une sorte de privilège supplémentaire qui les rapproche du roi et se retrouve aussi sur le frontispice. Le Privilège du Roy lui-même est, en 1672, une autorisation « d'imprimer ou faire imprimer» le livre pendant 15 ans et une interdiction à quiconque d'autre de le faire imprimer «à peine de six mille livres d'amende [...] dont un tiers sera appliqué à l'Hôpital Général, un tiers au dénonciateur, & l'autre tiers audit Exposant [le libraire-imprimeur]». Toujours valable en 1682, il est repris en citant les noms de Charles Osmont « Marchand-Libraire à Paris » et de Baron « Avocat en Parlement » et est « Registré sur le Livre de la Communauté des Libraires, Imprimeurs et Relieurs de Paris le 22 janvier 1678 » sous la signature de Coutterot, Sindic [sic]. En 1717, la protection est ramenée à une durée de 8 ans et l'amende à mille livres « dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hôtel Dieu de Paris, l'autre tiers audit Exposant», avec obligation d'imprimer « dans nôtre Royaume & non ailleurs, en bon papier & en beaux caractères » avec constitution d'une sorte de dépôt légal : « deux exemplaires dans nôtre Bibliothèque publique, un dans celle de nôtre Château du Louvre, et un dans celle de nôtre très cher et féal Chevalier Chancelier de France, le sieur Voysin [cité et blasonné par Playne]...». Les vicissitudes des vies professionnelles des Osmont et ces quelques informations tirées des Privilèges nous donnent un aperçu des pratiques corporatistes et éditoriales de l'époque.
Venons-en au fond, en commençant par la discussion sur l'étymologie du mot 'blason', engagée par Playne dans son chapitre I, au contraire de Baron, plus pragmatique, qui se lance directement dans une définition utilitaire :
« Le Blason n'est autre chose que la composition des pièces de métal et couleur qui se trouvent dans les Armoiries, qui dans leurs nature ne sont proprement que des marques de vraye Noblesse accordées par les Souverains pour récompense d'une valeur guerrière, ou d'une vertu notable, et continuées de père en fils pour la distinction des familles »
Playne, plus spéculatif, envisage plusieurs origines possibles, cite le père Ménestrier et Ménage [le Vadius ridicule des Femmes Savantes], et évoque même le mot grec Βλασείν qui signifierait 'extravaguer' pour ce que « ceux qui n'étoient pas accoûtumez aux Mysteres Heraldiques, regardoient comme autant d'extravagances la plupart des ornements des Ecussons des Cavaliers. » Il n'aboutit pas à des résultats plus concluants qu'Alain Rey dans son Dictionnaire Historique de la Langue Française, (Le Robert 1992) qui juge l'origine controversée, mais rappelle que jusqu'au XIVème siècle, 'blason' signifiait 'bouclier' « puis par métonymie la partie du bouclier où figurent les armoiries (XIIème siècle), puis ces armoiries (XIIème siècle), d'où les armoiries en général (1611).»
Baron, repris par Playne, commence par s'adresser à la Noblesse, pour leur recommander l'étude de l'Art Héraldique, qu'il qualifie comme « étant donc véritablement la Science de la Noblesse », « d'en posséder les lumières, & d'empêcher l'abus qu'il y a dans l'usurpation que la plupart des gens font des Timbres & des Couronnes, que l'on porte indifféremment: aussi bien que des Armoiries, que l'on s'attribue impunément de son autorité, sans les avoir acquises par aucunes actions glorieuses.»
En fait, ils limitent tous deux abusivement l'usage des armoiries, et font preuve de quelque flagornerie car, ainsi que le rappelle Michel Pastoureau, « il en va du système héraldique moderne comme du système héraldique médiéval: chacun est libre d'adopter et de porter des armoiries comme bon lui semble, à la seule condition de ne pas prendre celles d'autrui. » Les seules restrictions légales portaient en fait sur les timbres et couronnes, ornements de l'écu, parfois abusivement portés.
D'ailleurs, P08, Q08, R09 montrent l'écu d'un Baron - est-ce notre auteur roturier ? - 'd'azur au chevron d'or accompagné de trois molettes de même'. L'Armorial Général (voir ci-dessous) contemporain de notre manuel répertorie 53 Baron, de toutes classes et professions, mais ni le blason ci- contre, ni notre Jules A.E.P., peut-être décédé, ni d'ailleurs aucun Playne, ni sur les 16 Osmont cités, nos libraires parisiens. En revanche, l'écu des Capponi s'y trouve pour Louise, veuve de Gilbert, Ecuyer (Bourbonnais).
En 1696, Louis XIV promulgua donc un édit pour remédier au désordre héraldique existant et surtout générer une nouvelle recette fiscale (20 livres par individu à 300 livres pour une province) prolongeant l'impôt de capitation de 1695 et ses 22 classes de personnes imposables. Il fallait financer la Guerre de la Ligue d'Augsbourg. Sous un régime de fermage (achat de charges en avance des recettes), il créait, sous la supervision de Charles-René d'Hozier (1640-1732, fils de Pierre, comme lui généalogiste et juge d'armes), des maîtrises chargées de régler les causes héraldiques et un Armorial général où chacun devait enregistrer dans les deux mois ses armoiries sous peine d'amende et de saisie des meubles armoriés. Devant son relatif insuccès, furent établis des rôles de personnes notables et communautés 'capables' de porter des armoiries, avec attribution d'office s'il n'en déposaient pas dans les 8 jours, et donc création industrielle (Voir Note de l'Auteur n°11) d'armoiries nouvelles, loin de la simplicité des anciens temps ! Cela cessa en 1709. L'Armorial Général contenait alors 125807 armoiries peintes en couleurs en 35 volumes, par provinces, blasonnées en 34 autres volumes (tous accessibles sur Gallica). Playne n'en dit mot, peut-être y-a-t-il puisé ?
Nos auteurs poursuivent, dans la même manière obséquieuse, l'évocation des hauts personnages du Royaume, sans citer les plus modestes, surtout Playne qui complète les précédents descriptifs de très nombreux détails. Ainsi les 8 lignes consacrées en 1682 par Baron à 'La Devise', deviennent en 1717 un chapitre de 5 pages 1⁄2, avec de nombreux exemples et un renvoi, « comme nous affectons ici la brièveté » [!] à l'ouvrage de Le Moyne: De l'Art des Devises «où il en rapporte les règles et des exemples qui pourront satisfaire la curiosité (Voir Note de l'Auteur n°12)».
En résumé, l'Art héraldique est un traité descriptif qui a pris beaucoup d'embonpoint au long de ses éditions, et glorifie un ordre essentiellement aristocratique bien établi, sans beaucoup de profondeur historique ou sociologique. Pour moi, le charme de l'héraldique tient dans l'adéquation des formes, couleurs et règles, standardisées, nombreuses mais limitées, utilisées pour construire les armoiries, avec le langage normalisé et lapidaire qui permet de les décrire précisément, permettant le jeu suivant avec les mots : blasonner correctement et brièvement des armes que je découvre.
On ne retrouve pas cette belle adéquation dans les logos de toutes formes et couleurs qui fleurissent aujourd'hui pour les régions, départements, sociétés, clubs, etc. et alimentent toute une activité rémunératrice de conseil pour établir un logo et un slogan percutants, successeurs lointains des armes et de la devise. On la retrouve en revanche dans l'héraldique imaginaire, traitant des armoiries attribuées à des personnages de fiction, littéraire (le Cycle de la Table Ronde en expose environ 200 depuis le Moyen-Age, ...), mythologique ou cinématographique (souvent avec des imperfections). Au delà, les érudits trouvent, dans l'héraldique, des sources d'information et de datation, de réflexions historiques, archéologiques, sur la symbolique et sur les mentalités.
Pour tenter de répondre à la question du début, terminons par l'épigraphe choisie par Baron, absente en 1672, présente en 1682, maintenue par Playne en 1717 : curieux choix d'une variante d'un fragment de Flavius Vopiscus, obscur auteur d'une Vie d'Aurélien (général puis empereur entre 270 et 275), faisant partie de l'Histoire Auguste par six biographes, continuateurs de Suétone, des vies d'empereurs romains de 117 à 285 (Voir Note de l'Auteur n°13). Traduisons-la simplement par :
« On trouvera ces choses frivoles peut-être, et trop minimes, mais pourtant une honnête curiosité ne les rejette pas ».
Certes, mais n'oublions pas le contexte historique et social terrible de cet engouement constaté pour les manuels d'héraldique, loin des frivolités et futilités de la galerie du Palais: guerres, voracité des financiers, répression des révoltes (bonnets rouges, camisards ...), colonisation, reconnaissance et organisation de l'esclavage ('Code noir' de 1685), grands froids, retour de famines médiévales avec 1,5 million de morts en 20 ans, et souvenons-nous de ces paysans, 85 % alors de la population, ignorant les blasons, qu'évoque La Bruyère en un texte célèbre de 1689 :
« L'on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés de soleil, attachés à la terre qu'ils fouillent et qu'ils remuent avec une opiniâtreté invincible; ils ont comme une voix articulée, et quand ils se lèvent sur leurs pieds, ils montrent une face humaine, et en effet ce sont des hommes; ils se retirent la nuit dans des tanières où ils vivent de pain noir, d'eau et de racine; ils épargnent aux autres hommes la peine de semer, de labourer et de recueillir pour vivre, et méritent ainsi de ne pas manquer de ce pain qu'ils ont semé. » Les Caractères. De l'homme. 128.
avant de nous évader aujourd'hui - en héraldique ... ou en bibliophilie - dans un contexte très préoccupant aussi, mais avec une honnête curiosité encore, sur l'étroit et vertigineux sentier entre frivolité légère et pesant sérieux ...
Jacques Giber (Juillet 2019)
ANNEXE I: l'ex-libris manuscrit de l'exemplaire de 1672.
J'ai eu moins de chance dans mes recherches qu'avec l'ex-libris 'Meunié' de Manon Lescaut, apposé 99 ans plus tôt (voir l'article correspondant). Celui-ci est au nom de 'Latoison-Duval.' On connaît, assez peu d'ailleurs, le modeste peintre Charles Latoison-Duval, né en 1813 à Paris et décédé le 12 octobre 1888 à Lagny-sur-Marne, ville où il résida 50 ans et à laquelle il consacra son activité de dessinateur, d'historien et de bénévole; une rue y porte son nom. Mais le G. du prénom fait penser à Gabrielle Latoison-Duval, poétesse discrète du début du XXème siècle, dont les dates de naissance et de décès me sont inconnues. Elle pourrait être la fille ou la bru du précédent, ou même de la génération suivante. Si c'est bien elle, elle aurait donc signé l'ex-libris l'année de la mort de Charles, mais publié au siècle suivant.
Je n'ai pas non plus retrouvé d'édition de son ouvrage Sur la route humaine (1909), dont est extrait le poème Tu ne sais pas aimer! qu'a publié la Revue des poètes du 10 mai 1909, 20 alexandrins en 4 strophes dont voici la première :
« Si l'amour que tu viens offrir à cette femme
Tel, en un vase d'or, un merveilleux dictame
Riche en philtres secrets pour guérir ou calmer,
Ne puise son essence au plus pur de ton âme,
Tu peux être amoureux, tu ne sais pas aimer. »
J'ignorerai toujours comment ce manuel serait venu entre ses mains, pourquoi elle l'aurait signé de son nom, la seule au long des siècles, et si elle en aurait tiré matière à poésie (quoique le vase d'or ne s'y trouve pas, ce meuble existe bien), pourquoi pas. Les livres passent, nous survivent, s'imprègnent de multiples histoires, mais en témoignent hélas très peu ...
ANNEXE II : la restauration des deux livres.
Nous avons vu que malgré leur bon état général, les deux livres présentaient quelques blessures dues au temps. Je les ai donc confiés à Anne Liégard, artisan relieur, spécialiste en conservation des documents patrimoniaux, à l'enseigne Les Liens de la Mémoire, près de Caen.
Sur le 1672, elle a nettoyé le cuir, retiré la réparation d'origine en tête et l'étiquette en queue, refixé la tranchefile de tête et reconstitué la coiffe au papier japon teinté à l'aquarelle, réparé le coin avant bas éclaté, redressé les coins et nettoyé les feuillets de garde avant et arrière et des pages intérieures, qu'avaient salis de fréquentes manipulations par des mains pas très propres (Voir Note de l'Auteur n°14), car ce manuel comme l'autre, paraît avoir souvent été manié et consulté au cours du temps, peut-être surtout au début. Le livre est métamorphosé tout en gardant son esprit d'origine.
Sur le 1717, elle a refixé les 3 feuillets presque désolidarisés, après nettoyage à sec et consolidation, à la tylose et au papier japonais ultra fin, de leur marge gouttière effrangée, procédé à diverses greffes ( angle p107, bord de R01, etc. ) avec du papier de même nature datant de fin XVIIIème, redressé les coins, nettoyé les plats papier, remis en place des éclats de papier sur les champs de carton. Cette reliure standard réalisée en fait vers 1960, avec un beau cuir mais un papier particulièrement fragile et abîmé par endroits, pourrait bien être un jour remplacée par un plein veau à nerfs, comme son aînée ...
Pour le moment, ce duo que j'ai constitué, ainsi rajeuni avec prudence et dextérité, peut entamer sa nouvelle existence en tandem dans ma bibliothèque; qu'en sera-t-il quand elle sera dispersée ?
Notes de l'Auteur - Jacques Giber
1 - Depuis au moins septembre 1979, quand j'ai acheté Les Armes, initiation à l'héraldique, texte et nombreuses illustrations de Pierre Joubert (l'illustrateur des collections Signe de Piste et Marabout Junior de mon enfance), 1977, Ouest-France, une introduction au sujet superbe et colorée, puis un peu plus tard, l'érudit Traité d'héraldique de Michel Pastoureau.
2 - Traité d'héraldique Paris Picard 1979. Michel Pastoureau. Préface de Jean Hubert, membre de l'Institut. Bibliothèque de la Sauvegarde de l'Art Français.
3 - (1631-1705), jésuite, historien, théoricien de la musique et de la danse, polygraphe très prolifique sur tous les sujets abordés, avait-il du temps à consacrer à son état ecclésiastique ? Oui, à en croire Paul Allut qui établit au XIXè siècle un catalogue de ses œuvres: « La noble intelligence du P. Ménestrier embrassa tout, depuis les spéculations les plus élevées de la science jusqu’aux plus humbles documents que son immense lecture aidée d'une mémoire prodigieuse lui fournissait incessamment & qu'il sut mettre à profit avec une rare sagacité. Prêtre régulier, religieux exemplaire, homme de lettres & savant, il sut concilier le devoir & la piété avec le contact du monde: son zèle suffisait à tout. Grâce à la pénétration de son esprit, à une vie laborieuse, à une étude profonde des hommes & des choses, il trouva le moyen de parler de tout ex-professo; toujours avide de s’instruire, il était en relations suivies avec tous les savants français & étrangers qui entretinrent un commerce de lettres avec lui jusqu’à sa mort. » https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5038357?rk=42918 ;4 page 88.
4 - Sur le site du Kunsthistorisches Institut in Florenz, https://dlc.mpdl.mpg.de/dlc/view/escidoc:77289:23/recto-verso , avec l'ex-libris manuscrit du Dr E. Ménard
5 - Actif à la fin du XVIIème siècle, il paraît avoir été spécialiste de la gravure de blasons, puisque Gallica le cite aussi pour la réalisation à l'eau-forte d'un jeu de 52 cartes des blasons de l'Angleterre. https://data.bnf.fr/fr/14910789/lulie/
6 - Famille de marchands-banquiers florentins, rivaux des Médicis qu'ils supplantent brièvement, installée et naturalisée dans le Lyonnais au début du XVIème siècle, puis alliée à la famille Gadagne, exilée de Florence, dont ils absorbent la banque; une courte rue piétonne pavée de la Croix-Rousse, à l'entrée très étroite, porte ce nom en souvenir de Laurent qui nourrit 4000 pauvres pendant les trois mois de la famine de 1573. https://www.ruesdelyon.net/rue/34-rue-capponi.html
7 - Souvenons nous du mot de Baudelaire, dans une préface aux Fleurs du Mal, rapporté par l'artiste minimaliste Vera Molnar comme titre de son exposition au Kunsthalle de Brême en 2006: « MONOTONIE, SYMETRIE, SURPRISE ».
8 - https://data.bnf.fr/12239358/charles_osmont/#other-pages-databnf
9 - Albert Robida (1848-1926), pages 146-147, in Le Cœur de Paris. Splendeurs et souvenirs. A la Librairie Universelle 1896. Grand in- quarto. Texte, dessins et lithographies par A. Robida, expressifs et documentés. Mon exemplaire est un beau premier tirage sur Chine, comprenant un frontispice gravé, 8 lithographies hors-texte (avec en plus un état avant la lettre), 16 planches hors-texte dont 8 en couleurs et 250 dessins dans le texte. Relié demi-maroquin bradel havane à coins par Carayon.
Voir aussi l'eau-forte d'Abraham Bosse, La Galerie du Palais en 1638 sur http://expositions.bnf.fr/bosse/grand/158.htm : des personnages d'époque Louis XIII devant une librairie, un comptoir de gants et éventails et un comptoir de collerettes et manchettes.
10 - ... et 2 ans avant la fin de d'Artagnan amoureux de Roger Nimier ; http://www.pastichesdumas.com/php/listeindex.php recense 200 suites !
11 - Par construction d'armes 'parlantes' souvent ridicules voire outrageantes (pour les récalcitrants) ou fabrication mécanique à partir d'un schéma général où toutes les combinaisons d'une série de pièces et de meubles sont colorées de tous les émaux, puis attribués à la suite aux notables. Pour une recherche alphabétique et ludique, voir http://www.heraldique-blasons-armoiries.com/armoriaux/hozier.html.
12 - Curiosité qui pourra être assouvie sur https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57412s. Le R.P. Le Moyne (1602-1671) est encore un jésuite polygraphe, professeur, prédicateur, théologien, surtout poète épique dont Boileau dit que «s’il était trop fou pour qu’on en dît du bien, il s’était trop élevé pour en dire du mal.». De l'Art des devises est publié en 1665 chez « Cramoisy, Libraire et Imprimeur ordinaire du Roy, Directeur de l'Imprimerie Royale en son Chasteau du Louvre ».
13 - Baron l'ignorait à son époque, mais la recherche moderne a établi la mystification : ces six noms d'auteurs sont en fait les hétéronymes d'un seul rédacteur de la fin du IVème siècle, probablement Nicomaque Flavien l'Ancien ou son fils.
14 - A ce propos, l'article de C. A. Baker et R.Silverman dans International Preservation News (n°37, 2005) établit que la manipulation de livres anciens avec des mains bien lavées et séchées est préférable au port des traditionnels gants en coton, notamment en salle de lecture ; voir https://www.ifla.org/files/assets/pac/ipn/ipnn37.pdf , texte en anglais puis en français : Fausses idées sur les gants blancs.